Évaluer les solutions fondées sur la nature pour s'adapter au changement climatique dans les outre-mer
Les résultats de l’évaluation des projets de Solutions d’adaptation côtière fondées sur la Nature (SafN) déployés dans les Outre-Mer français sont synthétisés sous la forme de trois recueils régionaux qui portent respectivement sur les régions Caraïbe, Pacifique et océan Indien . Ces recueils présentent une synthèse de la méthodologie qui a été élaborée pour évaluer ces projets d’adaptation, ainsi qu’une synthèse des projets évalués sous la forme de fiches-projets. Le recueil portant sur La Réunion est le deuxième à avoir été disséminé, dans le cadre de l’atelier de restitution qui a eu lieu sur site en octobre 2024.
21 & 22 octobre 2024 : organisation de l'atelier de restitution ADAPTOM à La Réunion
L’atelier de restitution du projet ADAPTOM à La Réunion s’est tenu les 21 et 22 octobre 2024. Il a été préparé avec l’appui technique et financier de la DEAL Réunion, qui l’a cofinancé avec la Fondation de France. Les deux journées d’atelier ont été consacrées à la présentation des réalisations produites dans le cadre du projet ADAPTOM et de ses résultats concrets, sur la base de l’analyse de 26 projets.
Pour l’occasion, trois acteurs de la Caraïbe ont été invités afin de présenter les projets de SafN déployés en Martinique et en Guadeloupe : Doris JOSEPH (responsable du Service Environnement et Cadre de Vie, Commune du Lamentin à La Martinique) a présenté le projet RECIPROCITE qui vise à mieux connaître, valoriser et gérer la mangrove ; Didier LAMBERT (chargé de mission Aménagement et Gestion au Conservatoire du littoral, Antenne de Guadeloupe) a exposé le projet de gestion intégrée de la plage de la Saline ; et Matthieu FELLMANN (responsable du Service Biodiversité et Gestion Durable à ONF Guadeloupe) a présenté les actions de renaturation du littoral de Port-Louis Nord.
Au cours de ces deux journées, des sessions en salle ont été organisées afin d’apporter des éléments de cadrage et de réflexion sur l’utilisation des SafN pour réduire les risques côtiers actuels à futurs, de présenter la méthodologie d’évaluation ADAPTOM, de partager des présentations des projets caribéens, et d’exposer et mettre en discussion les résultats produits. Des visites de sites ont également été organisées avec des porteurs de projets de SafN à La Réunion.
Les discussions ont permis de pointer les besoins suivants : réévaluer les projets de SafN à une fréquence régulière, maintenir les échanges et les efforts engagés par la communauté d’acteurs œuvrant pour le développement de ces initiatives dans les Outre-mer à travers la poursuite d’ADAPTOM (ADAPTOM 2 ?).
Présentation de l’atelier ADAPTOM Réunion (crédit : Virginie DUVAT, 2024)
Au cours de ces deux jours, trois visites de sites ont été organisées sur le territoire réunionnais. Lors de la première journée, le projet de réhabilitation d’une partie de la plage à Cambaie a été présenté par l’ONF Réunion, représenté par Cécile FOURTET. Ce projet porté par la Commune de Saint-Paul et l’ONF et réalisé entre 2019 et 2023, en partenariat avec le CEDTM (Centre d’Etudes et de Découverte des Tortues Marines) et la DEAL, vise à réduire l’érosion côtière en renforçant la formation végétale littorale, tout en participant à la préservation des tortues marines en réhabilitant leur habitat terrestre.
Présentation du projet de réhabilitation de la plage de Cambaie par Cécile FOURTET de l’ONF Réunion (crédit : V. DUVAT, 2024)
Les visites se sont poursuivies l’après-midi avec les explications de Houlam CHAMSSIDINI, chargé d’opération « aménagement paysager et suivi environnemental » à la Commune de Saint-Paul, sur le projet de valorisation et de restauration de la frange littorale boisée de l’Hermitage-les-Bains (2017-2023). Ce projet répond à cinq objectifs : réduire l’érosion côtière, renforcer la biodiversité, sensibiliser le public aux grands enjeux environnementaux, améliorer le cadre de vie des habitants et des usagers, et favoriser la mobilité douce. Pour répondre à ces objectifs, plusieurs actions ont été menées comme le rechargement, le reprofilage de la plage ou encore la plantation d’espèces indigènes du littoral telles que le Manioc bord de mer (Scaevola taccada) ou la patate à Durand (Ipomoea pes-caprae).
Les visites se sont terminées le mardi après-midi avec les explications de Quentin Rivière et de Marie Gilbert du CEDTM (Centre d’Etudes et de Découverte des Tortues Marines), qui ont présenté les actions menées sur les sites de Cap Champagne (Boucan Canot) et du cimetière Saint-Leu (Saint-Leu) dans le cadre du programme de réhabilitation des sites de ponte des tortues marines lancé en 2017. Ce programme vise à réduire l’érosion côtière actuelle et future afin de préserver les sites de ponte, à sensibiliser le public et fédérer un réseau d’acteurs autour de cette problématique, et à améliorer le cadre de vie.
Avec l’association JACARANDAS, le CEDTM emploie 18 agents de terrain (contrat PEC) qui contribuent au programme de réhabilitation des sites de ponte. L’association était présente sur le site du Cimetière Saint-Leu et a pu présenter ses actions.
Présentation des missions menées par le CEDTM (crédit : V. DUVAT, 2024)
Visite du site de Cap Champagne et du Cimetière Saint-Leu où le CEDTM déploie des actions pour réhabiliter les sites de ponte des tortues marines (crédit : V. DUVAT, 2024)
Nous tenons à remercier l’ensemble des participants pour les nombreux échanges et la qualité de leurs interventions à La Réunion. Nous remercions également la DEAL et la commune de Saint-Paul pour leur appui à l’organisation logistique de cet atelier.
Le projet ADAPTOM se poursuivra dans l’Océan Indien (La République de Maurice, l’archipel des Comores, et Madagascar) avec le projet de recherche ADAPTNAT (2024-2026), financé par l’AFD dans le cadre de la phase 2 du programme AdaptAction.
L’ensemble des participants présents à l’atelier ADAPTOM Réunion les 21 et 22 octobre 2024 (crédit : E. BOISSONNADE-BOYER, 2024)
12 octobre 2023 : atelier "Des Solutions fondées sur la Nature pour préserver notre littoral ?"
animé par Virginie Duvat lors des Assises Régionales des risques de La Réunion
Mission sur l’île de la Réunion du 18 au 30 Octobre 2022
En octobre 2022, une mission de terrain tournée vers l’océan Indien et plus précisément l’île de la Réunion, a permis de mieux cerner l’ampleur du déploiement des Solutions fondées sur la Nature sur ce territoire insulaire volcanique de quelques 200 km de circonférence. Du 18 au 30 octobre, la chargée de mission du projet ADAPTOM, Inès HATTON, a ainsi pu rencontrer et interroger les principaux acteurs s’intéressant à la gestion de la zone côtière (DEAL, BRGM, OFB, communes, CEDTM, CBNM) et documenter six projets impliquant des Solutions fondées sur la Nature. La réalisation d’entretiens semi-directifs auprès des acteurs concernés ainsi que les visites de sites ont été complétées par une campagne d’enquête concernant la perception des risques côtiers et des solutions d’adaptation au changement climatique par la population.
Cette mission a permis : (1) de collecter des données sur les différents projets invoquant des Solutions fondées sur la Nature pour réduire les risques côtiers, (2) de renseigner plus particulièrement des actions de restauration côtière mises en place depuis plus de 20 ans par le Centre d’étude et de Découverte des Tortues Marines (CEDTM), (3) de comprendre le contexte local en matière de gestion des risques côtiers et d’adaptation au changement climatique, (4) de produire des données d’enquête qui permettront une analyse statistique de la perception par la population des risques côtiers et des solutions d’adaptation au changement climatique.
Dans les hauteurs de la Réunion se trouve le Conservatoire Botanique National de Mascarin (CBNM). La chargée de mission ADAPTOM s’est rendue dans ce sanctuaire végétal pour réaliser un entretien avec Marie LACOSTE (chargée de mission Habitats au CBNM) concernant la flore locale pouvant être utilisée pour réduire les risques côtiers sur les littoraux réunionnais.
1. Travaux de réhabilitation de la plage de Cambaie (Saint-Paul, île de la Réunion)
Sur la plage de sable basaltique de Cambaie, l’Office National des Forêts (ONF) en partenariat avec la commune de Saint-Paul et le Centre d’Etude et de Découverte des Tortues Marines (CEDTM), a effectué un reprofilage de la plage de sable basaltique tout en luttant contre les espèces exotiques envahissantes telles que le Prosopis juliflora (ou Zépinard à la Réunion) ainsi qu’en replantant des espèces végétales côtières afin de lutter contre le recul du trait de côte.
Ce projet, démarré en 2019, vise principalement à essayer de ralentir le processus d’érosion. Presque achevé aujourd’hui, il s’agit maintenant pour l’ONF de consolider les fonds qui permettrons de donner suite aux volets entretien et suivi du site. Le travail de reprofilage qui a eu lieu sur ce site s’est appuyé sur un projet similaire porté par l’ONF en 2010 à l’Etang-Salé.
2. Réhabilitation écologique d’un site de ponte de tortues marines à l’Etang-Salé (île de La Réunion)
La plage de l’Etang Salé a été très abimée par la déforestation passée ainsi que les prélèvements de sables massifs dans les années 80. Cette plage se caractérise par un phénomène d’érosion important qui se traduit par un talus d’érosion très raide ne permettant plus aux tortues de venir pondre. Un entretien avec Julien TRIOLO (Ingénieur écologue et responsable du pôle écologie à l’ONF et porteur du projet à l’époque) a permis de renseigner ce projet de réhabilitation écologique mise en œuvre sur la plage à L’Etang-Salé. Les actions de réhabilitation ont eu lieu entre 2010 et 2013, trois portions de plage ont été reprofilées de façon à former une pente plus douce. La replantation de végétaux indigènes a accompagné cette opération. Aujourd’hui des talus d’érosion se sont reformé sur les trois sites, mais ces derniers restent bien moins marqués que sur les portions du littoral qui n’ont pas bénéficié de ces travaux.
3. Les actions du Centre d’Etudes et de Découverte des Tortues Marines (CEDTM) : un acteur majeur du territoire Réunionnais en faveur de la préservation et de la restauration des plages.
Depuis les années 90 des actions en faveur des tortues marines sont mises en œuvre sous l’impulsion de l’équipe du CEDTM. C’est sur ces nombreuses années d’expériences passées que s’appuie le programme de réhabilitation des sites de pontes entamé en 2017. La rencontre avec Léo Pairain (statut) a permis de bien comprendre les actions menées par le CEDTM. Ce programme concerne principalement quatre sites : les criques sableuses à Trois-Bassin, le système plage-dune de Ravine Mulla, la plage de Cap-Champagne et la plage devant le Cimetière de Saint-Leu, ces deux derniers sites étant particulièrement touchés par l’érosion côtière. Le but est principalement la restauration des sites de pontes et la préservation des tortues marines. Pour cela un travail est fait afin de lutter contre des espèces exotiques envahissantes d’une part, et replanter des végétaux adaptés au milieu côtier et rendant des services aux tortues marines d’autre part. La plantation de ces végétaux vise également, dans un second temps, à lutter contre les phénomènes d’érosion afin de préserver les habitats terrestres de ces mammifères marins devenu un des emblèmes de l’île de la Réunion
4. Valorisation et restauration de la frange boisée littorale de l’Hermitage-Les-Bains
Le projet « valorisation et restauration de la frange boisée littorale de l’Hermitage-Les-Bains » est en cours depuis plus de 10 ans, dans quelques mois la partie opérationnelle de ce projet touchera à sa fin. La rencontre avec Erwan Billy (en charge de ce projet à la mairie de Saint-Paul) a permis de tracer les contours d’un projet ambitieux visant à replanter de la végétation sur un linéaire de plus de 2km. Lieu très prisé par les habitants de l’île et les touristes, la plage de l’Hermitage les Bains a fait l’objet de plusieurs opérations. Aux aménagements dédiés à l’accueil du public (ex. : cheminements d’accès) et aux efforts de sensibilisation s’ajoutent des actions visant à lutter contre l’érosion côtière. Pour cela, les porteurs du projet ont décidé de reconstituer le haut de plage en adoucissant la pente aux endroits où un talus d’érosion était présent. Près de 8000 graines de plantes rampantes ont aussi été semées afin de contribuer à la retenue du sable, des points durs tels que des souches d’arbres exotiques (ex. : filaos) situés trop prêt du rivage ont également été retirées.
5. Gestion sédimentaire au port de Saint-Gilles
Au port de plaisance de Saint-Gilles, le précieux sable corallien qui s’accumule derrière les cordons d’enrochement est régulièrement collecté afin de recharger en sable d’autres plages de l’île affectées par l’érosion.